Très prônée par certains qui déclarent cette méthode excellente si les souches sont de bonne qualité , elle est parfois très décriée par d’autres. Les éleveurs y ont été longtemps assez généralement hostiles quand ils ne s’y sont pas opposés avec force bien que certaines races d’animaux aient été entièrement créées de cette façon.
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La consanguinité est une méthode de reproduction dans laquelle on associe des géniteurs de même famille, apparentés par un degré plus ou moins éloigné. En effet, selon un code précis il y a autant de degrés de parenté que de générations en ligne directe en remontant à l’ancêtre en ligne collatérale.
Ainsi, entre un père et son fils il existe un degré de parenté dit de 1er degré. De la même façon, la parenté est de 2ème degré entre un père et son petit-fils mais aussi entre un frère et sa sœur . Elle est de 4ème degré entre cousins germains. La consanguinité est décroissante dans l’ordre suivant : frère x sœur, demi-frère x sœur, neveu x tante.
Il ressort de cet ensemble de faits que la consanguinité collatérale s’utilise fréquemment avec de très bons résultats à condition que les sujets utilisés soient des " sujets d’élite ". Elle parvient même à un haut degré d’uniformité dans le type et dans les performances. Elle permet de concentrer dans les individus qui en résultent les gènes d’un ancêtre qui est déjà intervenu plusieurs fois dans la lignée. Elle tend à séparer la race en familles distinctes, chacune reliée à un ancêtre remarquable dont on a voulu fixer les caractéristiques. Entre ces familles il est impossible de pratiquer une sélection familiale. Le consanguinité linéaire augmente notablement l’homozygotie et le pouvoir raceur. Nous reviendrons ultérieurement sur ces deux points.
Les applications pratiques de la consanguinité linéaire sont intéressantes à considérer. Il est évident que si un mâle a produit avec différentes femelles des descendants de qualité supérieure à leur mère il ne faut pas hésiter à utiliser le pouvoir raceur de cet étalon et à fixer ses caractéristiques. On augmentera donc la relation de parenté entre ses descendants et lui par une consanguinité en ligne directe. Si ce mâle raceur est mort, on devra l’utiliser indirectement à travers ses descendants : dans ce cas, il est toujours important d’appliquer rapidement le système de consanguinité linéaire avant que la relation de parenté entre lesdits descendants soit trop basse. Il sera bon même de recourir à la consanguinité collatérale entre cousins germains.
Une autre application de la consanguinité linéaire est l’établissement d’une lignée, problème qui peut se poser à l’éleveur qui démarre une souche. Pour établir une lignée, il faut dans un premier temps acquérir des sujets d’excellente qualité, en parfaite condition de santé et répondant parfaitement au standard. Les femelles seront accouplées à un mâle " étalon " issu de la même lignée qu’elles, lignée de l’ancêtre mâle de ces femelles. Ce mariage doit permettre l’obtention de produits de valeur parmi lesquels on pourra sélectionner les meilleurs. Au cas où cette alliance n’est pas possible, on peut se servir de la femelle comme base en l’accouplant au premier tour avec un excellent mâle d’un courant de sang différent puis au deuxième tour avec un autre mâle de valeur ayant un lien de parenté avec celui du premier tour. On sélectionnera les meilleurs issus de ces deux nichées qui seront ensuite accouplés ensemble et donneront une production homogène composée de sujets d’excellente qualité.
Lorsqu’après un certain temps de consanguinité linéaire on se rend compte que cette consanguinité est devenue trop étroite dans une lignée (le signal d’alarme en est l’apparition de sujets instables, chétifs et aussi le ralentissement de la vitesse de croissance des jeunes), il faut alors introduire un " sang " nouveau. C’est la retrempe ou out breeding. La meilleure façon d’y parvenir sans trop perturber le travail déjà accompli est de rechercher un mâle étalon ayant 50% de sang étranger. En pratique il faut donc retremper à l’aide de fils d’un étalon issu de la lignée consanguine intéressée et d’une femelle d’une lignée totalement différente.
La consanguinité qui tend à accroître le nombre des homozygotes fait aussi apparaître toutes les tares et tous les caractères défectueux qui pouvaient exister dans la souche à l’état récessif. Ainsi quand on la met en œuvre convient-il de procéder à une sélection impitoyable et de ne conserver pour la reproduction que les individus qui produisent les oiseaux les plus sains, les mieux constitués, les plus proches du standard. Les chances de réaliser les améliorations envisagées sont supérieures si l’on utilise pour la reproduction consanguine des sujets ayant subi la sélection génotypique sur la descendance parce qu’on est certain qu’ils possèdent les gènes désirés. Le pourcentage d’homozygotes augmente dans une population avec les alliances consanguines (loi de Hardy) de même qu’augmente la probabilité d’hériter d’un caractère des géniteurs initiaux, mâle ou femelle. Par une étroite consanguinité, le pourcentage de chances d’obtenir des hétérozygotes diminue de moitié : les hétérozygotes disparaissent donc au fur et à mesure des mariages consanguins alors que seuls les homozygotes subsistent et que s’accroît l’homogénéité de la population envisagée. Il est évident que la consanguinité étroite plus ou moins incestueuse comme l’indiquent les exemples pratiques précités, c’est le " in and in " des anglo-saxons consistant en des alliances père x fille, fils x mère, frère x sœur. La moindre tare récessive risque évidemment de prendre le dessus chez certains produits issus de ces accouplements de même qu’un caractère bénéfique peut prédominer chez d’autres ce qui justifie l’aphorisme de Lush " La consanguinité n’est pas le crime, elle découvre le crime ". Les tares, défauts ou qualités sont conditionnées par des gènes qui, quoique récessifs, apparaissent grâce à l’homozygotie alors qu’ils étaient masqués précédemment par l’hétérozygotie des géniteurs initiaux.
Une consanguinité large consiste à manier des individus peu apparentés . L’" in breeding " ou " close breeding " est l’alliance de deux individus que séparent trois à quatre degrés de parenté. Le " line breeding " est celle d’individus séparés par quatre ou cinq degrés de parenté. Enfin on parle de " large breeding " lorsque plus de cinq degrés de parenté séparent les reproducteurs.
L’utilisation de la consanguinité a longtemps été controversée et le problème obscurci par la partialité des éleveurs ainsi que par l’inexactitude des enseignements tirés des expérimentations et des essais pratiqués. La mise en pratique de la consanguinité suppose certaines précautions, résultant de la stricte observation de règles inébranlables, bien codifiées par le Docteur Roplet auquel nous emprunterons beaucoup dans les lignes qui vont suivre.
Règle 1 : La consanguinité tendant à l’homozygotie produit la pureté mais seulement pour la qualité considérée par l’éleveur.
C’est à dire que si les caractères que l’éleveur cherche fortement à améliorer bénéficient effectivement de cette méthode, les caractères faiblement cotés vont par contre dégénérer. Ils dégénèrent parce qu’on néglige, par attitude d’esprit ou par impossibilité matérielle (nombre de couples) d’éliminer les récessifs pour ces caractères secondaires. Il faut donc absolument éviter d’abandonner provisoirement l’amélioration de certains caractères considérés comme secondaires et éviter de concentrer uniquement son travail sur les qualités qui apparaissent primordiales en comptant redresser ultérieurement la situation et s’attacher alors à revaloriser ce que l’on avait momentanément méprisé. En effet, si on néglige une caractéristique, son défaut devient homozygote (loi de Hardy) et il n’est plus possible de réintroduire cette caractéristique que par des " infusions de sang nouveau " qui vont alors détruire tout le travail fait précédemment. Il y a évidemment nécessité de considérer de nombreuses caractéristiques car en s’occupant uniquement des qualités de typicité (mélanine...) on refoule à l’arrière plan les autres caractéristiques (morphologie, lipochrome...).
Règle 2 : Les mauvais effets de la consanguinité sont imputables à l’hétérozygotie toujours due à un out breeding dans les générations antérieures.
Paradoxalement, la consanguinité augmente dans ce cas la variabilité et la fréquence d’apparition des indésirables mais la grande erreur serait de revenir à l’alliance avec une autre femelle qui amènerait encore une plus grande variabilité. Le seul remède consiste en la prolongation d’une consanguinité étroite avec sélection rigoureuse des récessifs et leur élimination de la reproduction. Pratiquement, l’application de la consanguinité des alliances extérieures (out breeding) produit des indésirables. Mais le seul remède est de continuer la consanguinité. Il résulte de cela que la consanguinité est beaucoup plus avantageuse et bénéfique à bref délai dans une population déjà relativement consanguine que dans une population hétéroclite. Il ressort de cela que l’éleveur aura le plus grand intérêt à tester la descendance pour dépister l’hétérozygotie. Il arrivera à terme à produire une descendance homogène et à augmenter considérablement le pourcentage d’oiseaux de bon niveau. Ces oiseaux seront presque identiques et constitueront des stams d’une très grande homogénéité.
Règle 3 : Il ne faut pas utiliser de reproducteurs inférieurs à l’idéal que l’éleveur se propose d’atteindre.
La consanguinité ne donne d’heureux résultats que pour autant que la fréquence génétique du caractère favorable recherché soit élevée. L’éleveur cherche bien entendu à fixer ce caractère favorable. Il faut donc faire des alliances entre familles éloignées jusqu'à ce que l’on ait produit un nombre suffisant d’excellents individus pour commencer seulement la consanguinité. Le nombre d’individus excellents doit être grand car il y a toujours de nombreux sujets porteurs d’un phénotype trompeur à éliminer. Durant les quatre ou cinq premières générations, il faut surveiller non pas la qualité majeure d’un ensemble mais la qualité des meilleurs sujets qui seront seuls utilisables comme reproducteurs.
Règle 4 : Il ne faut, non plus, jamais utiliser d’animaux défectueux (homozygotes récessifs pour un caractère donné) .
En effet l’accouplement de deux oiseaux défectueux ne produira indubitablement que des oiseaux défectueux et l’on ne pourra jamais revenir à la dominance hétérozygote sans out breeding. Par contre l’obtention du caractère homozygote dominant dispense de sélectionner plus en avant ledit caractère.
Règle 5 : Il serait bon que les éleveurs travaillent en étroit accord, en partenariat, chacun sélectionnant des lignées différentes mais identiquement typées.
Le développement simultané de plusieurs lignées est en effet une garantie contre l’involontaire mais inévitable perte de gènes résultant de la consanguinité. Pouvoir puiser des mâles " étalons " ou des femelles dans ces différentes lignées peut permettre de rattraper d’éventuelles fautes et de ne pas aboutir à une impasse définitive. En outre, comme cela se passe très souvent en élevage, la date de séparation des lignées n’est jamais très ancienne et l’on apprend vite par des discussions que beaucoup d’oiseaux dans nos élevages ont des ancêtres communs provenant d’un élevage leader de l’époque d’achat des oiseaux. Ainsi, si l’éleveur n’a pas pratiqué trop d’out breeding, l’impureté résultant d’accouplements d’animaux de lignées différentes n’est jamais ni très grave ni très grande et les alliances extérieures ne produisent pas de trop importantes perturbations.
On fait en somme de la consanguinité quand on veut produire des sujets très proches de ceux qu’on admire. On élève de ce fait le coefficient de parenté qui autrement diminue de moitié à chaque génération. En outre, la consanguinité a un énorme avantage qui justement l’a longtemps déconsidérée dans l’esprit des éleveurs : elle aide à la sélection des gènes défavorables en faisant apparaître des sujets porteurs de caractères éliminatoires. Cette concentration sur certains individus de caractères défavorables permet leur élimination : il suffit d’éliminer de la reproduction les oiseaux tarés. L’idéal serait qu’un seul oiseau d’une nichée cumule toutes les tares.
La consanguinité permet également de former des familles distinctes offrant la possibilité d’une sélection plus sévère qu’entre individus. Surtout en ce qui concerne les caractères faiblement héréditaires. Elle permet enfin de tester la valeur héréditaire d’un mâle " étalon ". Le test de la consanguinité incestueuse sert d’épreuve et constitue le test le plus sévère de la valeur héréditaire d’un mâle. Mais le moindre des mérites de cette méthode de reproduction n’est pas d’avoir permis et de permettre la création d’individus fortement homozygotes qualifiés de RACEURS. Le pouvoir raceur d’un reproducteur c’est la capacité d’imprimer à ses descendants des caractères tels que ceux-ci ressemblent à leurs parents et se ressemblent entre eux plus que couramment.
En zootechnie il est habituel de désigner sous le terme d’" hérédité unilatérale " le fait pour un produit de ressembler uniquement à l’un de ses géniteurs. Un seul des deux ascendants a transmis ses caractères à l’exclusion de l’autre géniteur. Tout se passe donc comme s’il agissait seul et comme si le produit était le fruit de ses seuls gènes. Un géniteur ayant de pareilles qualités est évidemment un excellent raceur et possède la qualité de " racer " c’est à dire de marquer de son empreinte toute sa descendance, c’est ce que nous appelons un " marqueur de lignée ". Ces marqueurs sont peut-être la raillerie de certains de nos compatriotes gaulois dont les idées sur la consanguinité remontent au temps des romains mais ils existent bel et bien. En revanche, certains oiseaux brillent en concours par leur éclat et leurs qualités visibles mais ne s’avéreront que de médiocres géniteurs. La faculté de racer comme le définit fort bien le professeur Jean Blain n’est pas autre chose que la possession, par un reproducteur, de caractères dominants qui se maintiennent en première génération. C’est une faculté à laquelle il faut savoir attribuer des limites et que la sélection seule ne parvient pas à maintenir. Si la consanguinité n’est pas utilisée, il n’y a aucune raison dit le professeur Blain pour que les caractères dominants continuent à apparaître sur la totalité des sujets de deuxième génération. Si les bonnes qualités de raceurs ont persisté pendant plusieurs générations c’est que , pour une part, les sujets porteurs de caractères récessifs non recherchés ont été soigneusement éliminés. Nous l’avons vu, en effet mieux vaut faire la consanguinité étroite sur un bon reproducteur qu’une consanguinité large sur un reproducteur moyen. Sur le plan pratique il n’existe pas de géniteur qui race réellement mais il y a des géniteurs qui possèdent des caractères qui s’imposent. En se reportant aux lois de Mendel, cet abécédaire de l’élevage, il est aisé de constater qu’un géniteur possédant des caractères dominants en double dose (homozygotie) les transmettra obligatoirement à sa descendance tandis qu’un géniteur possédant les mêmes caractères en dose simple (hétérozygotie) ne les transmettra qu’à 50% de sa descendance. Or, le nombre de produits étant relativement restreint, le hasard peut faire qu’aucun jeune issu d’un mâle hétérozygote ne lui ressemble.
De ce qui précède il résulte donc nettement que les diverses causes du pouvoir raceur d’un individu sont :
1. l’homozygotie. Puisque parfaitement homozygote il ne produira que les gènes que nous auront sélectionnés. Le pouvoir raceur est donc directement proportionnel au nombre de bons gènes pour lesquels l’oiseau est homozygote.
2. la dominance. Puisqu’un descendant qui reçoit un gène dominant montre uniquement l’effet de ce gène. La valeur d’un reproducteur est donc maximale si tous les bons gènes sont dominants et à l’état homozygote.
3. l’épistasie. Phénomène par lequel un caractère dépend d’une combinaison de plusieurs gènes qui individuellement auraient eu un effet nul ou défectueux. Normalement, cette combinaison épistatique tend à être brisée à chaque génération tandis que la consanguinité linéaire permet d’augmenter sa probabilité.
La valeur du pouvoir raceur d’un individu est fonction des accouplements pratiqués. Les défauts sont fréquemment dus à des gènes récessifs et un reproducteur raceur peut les posséder à l’état hétérozygote. Lors de l’accouplement avec un animal quelconque, apparemment non défectueux, mais également hétérozygote pour le défaut considéré ce défaut pourra se manifester comme dans tout autre accouplement entre hétérozygotes. Enfin et hélas, le pouvoir raceur n’est pas transmissible sauf en ce qui concerne la dominance. L’homozygotie d’un mâle étalon ne se retrouve dans ses produits que si les femelles qu’on lui offre sont également homozygotes pour ces caractères recherchés. Or, un haut degré d’homozygotie ne peut être atteint que par de nombreuses générations successives et il peut malheureusement être détruit par un seul accouplement d’outbreeding.
On voit donc qu’en élevage il faut parvenir à un équilibre entre les caractères recherchés et les caractères indésirables. Cet équilibre dépend de l’habilité de l’éleveur et de ses connaissances mais il dépend aussi de son cheptel de départ et en particulier de l’abondance des gènes indésirables.
Enfin l’éleveur doit préserver cet équilibre en se réservant la possibilité de retremper dans d’autres lignées consanguines pour corriger d’éventuelles fautes ou rattraper les gènes favorables perdus dans sa propre lignée à la suite d’erreurs ou de situations fortuites. Il convient de rappeler que fonder une lignée c’est pratiquer le " in and in ", puisque perpétuer une lignée, fixer un caractère nouveau, améliorer une race c’est pratiquer une consanguinité plus ou moins large et qu’il ne faut pas hésiter à la pratiquer. Le coefficient de consanguinité à partir duquel commence le danger est fonction de la netteté du but, de l’exactitude des tests, de l’abondance des gènes indésirables, du pourcentage d’élimination possible d’après la vitesse de reproduction et d’après l’habileté de l’éleveur. La consanguinité aide à la sélection contre les gènes défavorables en les faisant apparaître et en les sacrifiant. Si le nombre de gènes récessifs est trop grand, la consanguinité devient impossible et la sélection ne peut être menée à son terme puisqu’elle n’atteint pas le but recherché. Le producteur d’animaux, quelque soit l’espèce ou la race, doit se convaincre qu’il n’y a pas de sélection possible et valable sans consanguinité de même qu’il n’y a pas de consanguinité bénéfique sans sélection. La production est finalement un art subtile qui réclame compétence et habileté, patience et dynamisme, qui demande aussi un certain doigté et une continuelle remise en question. C’est finalement de la judicieuse utilisation de la sélection, de la consanguinité et de l’outbreeding que dépend le devenir de chacune des races d’oiseaux qui font notre joie d’éleveurs et qui permettent ainsi aux humains que nous sommes de nous rencontrer et de tisser des relations chaleureuses.